Franco-Marocain d’origine espagnole, Mehdi-Georges Lahlou cultive une richesse intellectuelle et artistique puissante qui joue avec les symboles de son identité hybride pour ouvrir la voie à la coexistence nécessaire et pacifique des différences de chacun. Identités de genre, religion, sexualité, marginalité, pouvoir ont ainsi longtemps formé un corpus cohérent de thématiques contemporaines qui, à travers une grande variété de médiums et de pratiques, ont orienté le regardeur vers une réflexion critique, voire même politique, des stéréotypes culturels et identitaires que chacun subit ou engendre.
Aujourd’hui, Mehdi-Georges Lahlou revisite sa pratique pour l’ancrer plus encore dans une dimension universelle, servant ainsi de porte-voix aux invisibles « humains et non humains ». Son exposition au Parvis, intitulée La Conférence des Palmiers1, s’inscrit dans un cycle de recherches récentes pour lesquelles l’artiste investit les notions de mémoires, d’archives et de conflits géopolitiques passés et actuels, poussant plus loin encore sa traversée des grands enjeux civilisationnels qui marquent notre temps.
Au centre de son projet se trouve le voyage méconnu des plantes, provoqué par les effets décriés des colonisations occidentales puis de la mondialisation. En effet en 600 ans d’appropriation coloniales, les migrations vivrières ont, partout dans le monde, radicalement transformé les paysages naturels, les cultures humaines. Au Parvis, Mehdi-Georges Lahlou entame donc une conversation avec le regardeur sur la façon dont ladite « nature sauvage » a été, depuis les temps coloniaux, prise en main, domptée, instrumentalisée afin d’en tirer divers profits. Ses œuvres (vidéos, pièce sonore, sculptures, peintures, fusains, céramiques…), qui interagissant les unes avec les autres, décrivent et dénoncent avec force cette fascination occidentale pour « l’ailleurs » et son spectacle exotique à portée de main, ainsi que les ravages qu’elle opère sur la biodiversité au profit d’une croissance toujours plus vorace.
*1 dont le titre s’inspire du célèbre recueil de poèmes mystiques Persan « La conférence des oiseaux » écrit par le poète soufi Farid Al-Din Attar en 1177.
photo : (c) Hugard et Vanoverschelde
Mehdi-Georges Lahlou, La Conférence Des Palmiers, 2023